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Soutiens aux élèves en difficulté scolaire et/ou en situation de handicap dans le cadre de l’école ordinaire : entre adaptations nécessaires et accès au curriculum

 

Thèse présentée à la Faculté des Lettres
de l’Université de Fribourg (Suisse). 2017

 

Télécharger : http://doc.rero.ch/record/305003

 

Après une lecture attentive de cette recherche voici quelques extraits qui me semblent importants à relever :

Les pratiques inclusives : c'est quoi?

“Les « pratiques inclusives » : déceler les difficultés et intervenir de manière précoce, utiliser les technologies de l’information et de la communication (TIC), mettre en place des interventions centrées sur l’élève et ses besoins (AEEAI, 2014), développer un curriculum flexible et accessible, qui puisse être ajusté aux besoins et aux possibilités de chaque élève (UNESCO, 2005), repérer les besoins éducatifs particuliers des élèves et intervenir en conséquence (Kyriazopoulou & Weber, 2009), planifier l’enseignement en ayant tous les élèves à l’esprit, développer l’acceptation de la différence, utiliser l’apprentissage collaboratif, développer des ressources pour soutenir l’apprentissage (Booth & Ainscow, 2002).” (p.11)

Que dit la loi ?

“La Constitution Fédérale (Ibid.) mentionne que personne ne doit subir de discrimination « du fait d’une déficience corporelle, mentale ou psychique ». (p.21)

La LHand (2004) intervient également dans le domaine des inégalités, et ce notamment pour ce qui a trait à la formation :

« Il y a inégalité dans l’accès à la formation ou à la formation continue notamment lorsque :
a. l’utilisation de moyens auxiliaires spécifiques aux personnes handicapées ou une assistance personnelle qui leur est nécessaire ne leur sont pas accordées;
b. la durée et l’aménagement des prestations de formation offertes ainsi que les examens exigés ne sont pas adaptés aux besoins spécifiques des personnes handicapées ».”

 

“Schnyder et Jost (2013, p.8) relèvent cependant que tous les cantons se doivent de respecter et de mettre en œuvre la Constitution Fédérale ainsi que la LHand.”(p.39)

 

“Une autre observation faite au terme de l’analyse des textes législatifs et exécutifs est le fait que les cantons de Genève et de Fribourg sont ceux traitant le plus, et de la manière la plus claire, du concept de compensation des désavantages. Or, il apparait que l’échantillon dans ces deux cantons comporte un plus grand pourcentage d’élèves bénéficiant de compensation des désavantages que dans les trois autres cantons.
Enfin, un questionnement peut encore être abordé au sujet du lien possible entre le cadre légal et organisationnel des soutiens, et le profil des élèves intégrés. Ce questionnement concerne l’éventuelle influence de « l’offre » sur « la demande » en matière de soutiens.” (p.233)

L'accessibilité pour les personnes à besoins éducatifs particuliers (BEP)

“Plusieurs équipes de recherche se sont intéressées aux manières de rendre l’enseignement et l’évaluation accessibles aux élèves BEP. Ces pratiques peuvent être décrites selon deux pôles. On peut en effet distinguer :

  1. les adaptations faites à titre individuel, pour des élèves en difficulté scolaire ou en situation de handicap (cf. chapitre 3.1),
  2. des adaptations qui touchent la manière général de concevoir l’enseignement, dans le but de le rendre accessible à tous les élèves de la classe (cf. chapitre 3.2).” ( p.34)
Compensations des désavantages

La compensation des désavantages est vue comme un outil important de l’intégration scolaire (Schnyder & Jost, 2013). Selon ces auteures (Ibid., p. 5), elle « consiste en la neutralisation ou la diminution des limitations occasionnées par un handicap. Ce terme désigne l’aménagement des conditions dans lesquelles se déroulent un apprentissage ou examen et non une adaptation des objectifs de scolarisation/formation ou une dispense de notes ou de branches ».
La compensation des désavantages ne doit pas être confondue avec l’adaptation des objectifs d’apprentissage. (p.37-38)

“Toutefois, ces propositions et exemples sont toujours à adapter et modifier en fonction de la situation individuelle particulière de l’enfant (voir p.ex. Vogt-Hörler, Ulrich-Neidhardt, Bellofatto, & Girsberger 2011; Centre suisse de service formation et orientation (CSFO), 2013 ; Département de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC), VD, 2008).” (p.38)

 

Des exemples de compensations

p.35 :

  • « La limitation de l’utilisation de l’écrit pour les élèves atteints de dyslexie peut par exemple être mentionnée (Direction générale de l’enseignement obligatoire [DGEO] (Vaud), 2008; Gombert, Feuilladieu, Gilles, & Roussey, 2008)
  • la possibilité d’utiliser un ordinateur pour un élève ayant des difficultés motrices ou des difficultés à s’exprimer par oral (Mitchell, 2008, p. 30) ;
  • la modification de la mise en page et de la taille de l’écriture pour un élève ayant des problèmes de vision ;
  • l’utilisation de la calculatrice par un élève ayant des difficultés d’apprentissage lorsque la tâche concerne la résolution de problèmes et non spécifiquement le calcul mental (Fisher & Frey, 2001).

… Cette accommodation doit permettre à l’élève concerné de faire de meilleurs résultats, mais ne devrait pas profiter spécialement à un élève n’ayant
pas cette difficulté spécifique.”

p.38

“Une forme de compensation des désavantages possible serait par exemple de ne pas juger la lecture ou l’écriture chez un élève dyslexique lorsque le domaine évalué n’est pas directement lié à ces deux compétences (histoire, mathématiques, etc.). Cela implique par exemple une lecture des consignes à voix haute, la passation du test à l’oral, ou la non prise en compte des fautes d’orthographes lors de l’évaluation du test (Giovanoli & Alder, 2013, p. 15).”

“Le CSPS (2015), dans le cadre de son mandat de recherche concernant la compensation des désavantages en Suisse, liste les mesures suivantes à titre d’exemples : « attribution de moyens auxiliaires ou d’assistance personnelle, adaptation des supports d’apprentissage et d’évaluation, prolongation du temps à disposition pour effectuer la tâche demandée, aménagement de l’espace physique, examen oral à la place d’un examen écrit (et vis-versa), etc. ».”

Des exemples d'adaptations

p.36

“Selon eux (Wehmeyer et al., 2001), les adaptations du curriculum consistent en des adaptations de la manière de présenter la matière ainsi que de la manière dont les élèves répondent aux demandent qui leur sont faites. Dans cette catégorie, les auteurs mentionnent par exemple l’utilisation de représentations graphiques pour soutenir l’apprentissage, le fait de passer par l’oral plutôt que par l’écrit, l’utilisation d’ordinateurs ou encore le fait de séquencer les apprentissages en unités plus petites, en résumant la matière, etc.”

Accommodation

p.37

Fisher & Frey (2001) parlent d’accommodations. Il s’agit du fait de modifier la manière dont la matière est présentée aux élèves, ainsi que la manière dont les élèves peuvent montrer leurs connaissances et leurs compétences. Elles parlent d’adaptation des stimulus (input) et des réponses (output). Enfin, les adaptations de l’environnement comprennent toutes les manières de modifier le setting de l’enseignement.

Et l’enseignant ?

p. 42

“Paré conclut que seul un tiers des enseignants interrogés comprennent et utilisent la différenciation pédagogique de manière appropriée.”

p.47

“Les enseignants se retrouvent « coincés » entre les exigences légales liées à l’évaluation des élèves et les exigences conceptuelles de la différenciation (voir p. ex. Reusser et al., 2011, p. 316 ou Tomlinson, 2005). “

Une réponse, la pédagogie universelle ?

p.9

“Selon l’Agence européenne pour l’éducation adaptée et inclusive (AEEAI) (2014, p. 11), une évolution a eu lieu dans le débat sur l’inclusion : « Il est passé d’un débat traditionnel axé sur le déplacement des enfants décrits comme ayant des besoins éducatifs particuliers vers les établissements scolaires ordinaires, à un débat destiné à fournir une éducation de haute qualité – et ses avantages corrélés – à tous les apprenants ».

p.51

“La conception universelle de l’apprentissage (CUA), le modèle de réponse à l’intervention (RAI), et la pédagogie différenciée. Ce concept a été créé dans l’idée de rendre l’enseignement en classe ordinaire accessible pour tous.”

p.52

“La Conception Universelle de l’Apprentissage (CUA) invite les divers acteurs de l’école à modifier le curriculum et les méthodes d’enseignement, tout comme le matériel didactique afin de fournir un maximum d’opportunités à tous les élèves d’avoir accès aux contenus de l’enseignement (Prud’homme et al., 2016, p. 132).”

“Trois principes clés sont à la base de la CUA et doivent être pris en considération lorsque l’on veut rendre l’enseignement accessible à tous (Rose & Meyer, 2002, p.75):

  • Pour soutenir le réseau perceptuel : présenter les informations (le contenu de l’enseignement) de différentes manières.
  • Pour soutenir le réseau stratégique : proposer aux élèves différents moyens de participer et de s’exprimer, et leur donner différentes options pour démontrer leurs apprentissages.
  • Pour soutenir le réseau affectif : permettre à tous les élèves de s’engager dans les apprentissages de diverses manières, en stimulant les intérêts et la motivation de chacun.”

“« Plutôt que de proposer un chemin quasi unique et de pallier les difficultés au fur et à mesure qu’elles émergent, la pédagogie universelle mise sur l’accès à une multitude de chemins susceptibles de répondre aux besoins individuels d’une diversité d’élèves » (Bergeron et al., 2011, p. 92).”

p.58

“en regroupant les philosophies et les pratiques sous-tendant le RAI, la CUA, la différenciation, ainsi qu’en refusant le modèle médical du handicap, on obtient une base intéressante au sujet des pratiques inclusives actuelles, visant à éviter de se concentrer uniquement sur les diagnostics des élèves (Bonvin, 2016).”

p.243

“Au niveau des pratiques, diverses formes d’adaptation de l’enseignement ont été évoquées au chapitre 3. Certaines ciblaient spécifiquement les élèves BEP, tandis que d’autres étaient destinées à l’ensemble de la classe. Ces dernières consistaient en un changement radical de la manière de concevoir l’enseignement : il s’agit de la différenciation pédagogique, la conception universelle de l’apprentissage (CUA) et l’approche de Réponse à l’intervention (RAI). Ces conceptions de l’enseignement sont perçues par bon nombre de chercheurs et de professionnels comme une possibilité de s’éloigner des diagnostics et des statuts spécifiques pour aller vers une prise en compte de la diversité générale des élèves, de leurs besoins et de leurs manières d’apprendre.”

Des objectifs pour aller vers des savoirs mais aussi des compétences

p.80

“Strauven (1996, p. 16), un objectif « exprime une intention et décrit un changement de l’apprenant. Ce changement doit être identifiable, attendu, et jugé souhaitable : il doit être cohérent avec le système de valeurs ».

La définition de l’objectif pédagogique proposée par Vandevelde (1982, cité par Strauven, 1996, p. 15) se fait en ces termes : « un objectif […] fixe un produit attendu, c’est à dire une capacité, une attitude, un savoir relatif à des objets ou à des contenus déterminés, au terme d’une action de durée limitée ».”

p.81

“Le résultat attendu de l’objectif devait être un comportement observable (Pocztar, 1979, p. 50).”

p.82

“Selon Pocztar (1979, p. 104), l’enseignement programmé consiste en une succession d’unités d’apprentissage à parcourir afin d’atteindre un objectif final. Pour atteindre cet objectif, on fixe des objectifs intermédiaires qui vont permettre de faire les pas nécessaires entre le niveau de départ et l’objectif final.”

“Bloom et sa Taxonomie des objectifs pédagogiques à ce mouvement.
Certains des concepts sous-tendant la pédagogie par objectifs et la pédagogie de la maîtrise ont été passablement critiqués. Rieunier (2000, p. 90) par exemple, met en garde contre le concept de la pédagogie par objectif qui veut une décomposition de l’apprentissage en petites unités, en « comportements élémentaires ». Selon lui, il ne suffit pas « de faire la somme des comportements pour reconstruire la compétence»”

p.82-83

“Dans son ouvrage, Fotso (2011, pp. 20-22) relève également le désintérêt pour les processus d’apprentissage comme un risque de créer des élèves étant des «exécutants strictes », très forts pour appliquer des routines mais n’apprenant pas à réfléchir, à explorer, et ne développant ainsi pas de stratégies d’apprentissage.
Enfin, le côté « technicien » de la pédagogie par objectifs et des taxonomies est relevé par Pocztar (1979) comme un risque de fermeture aux autres éléments faisant partie de l’enseignement et de l’apprentissage.”

p.84

“Les savoirs sont importants mais ils nécessitent de pouvoir être utilisés dans divers contextes, de manière compétente, pour résoudre des problèmes, comprendre le monde (Fotso, 2011; Perrenoud, 2000; Tschekan, 2014). Il importe donc de fixer des objectifs visant non seulement des savoirs, mais aussi des compétences,”

p. 242

“Par ailleurs, malgré les quelques limites évoquées plus haut, les résultats descriptifs concernant l’éloignement vis-à-vis du curriculum sont préoccupants. Ils questionnent l’acceptation par les enseignants, par le système scolaire et par la société du fait que certains élèves n’atteignent pas les mêmes objectifs que leurs pairs, mais puissent tout de même être scolarisés avec eux, et faire des apprentissages de type académique.”

“Selon Bonvin, (2016, p. 120) l’importance donnée aux diagnostics dans le cadre des
soutiens risque de mener à une sorte de surspécialisation du soutien, et au fait que
l’enseignant régulier se retrouve « dépouillé d’une partie de son pouvoir ou de sa compétence ».”